Le développement durable s’inscrit aujourd’hui dans la stratégie de plus en plus d’entreprises. Poussées par des consommateurs, et des collaborateurs, préoccupés par le dérèglement climatique, les sociétés doivent proposer de nouvelles solutions. L’économie circulaire entre alors en jeu. Basée sur la réduction de l’exploitation des ressources, au profit du recyclage, de la réparation et de la réutilisation, elle ne peut exister sans une logistique adaptée. Présentation des nouveaux enjeux de la Supply Chain, maillon incontournable d’une économie d’avenir.
Sommaire
Les enjeux d’une économie circulaire devenue indispensable
Enjeu environnemental
Menacée par un changement climatique qui ne cesse d’accélérer, notre société se retrouve aujourd’hui à la croisée des chemins. D’un côté, l’envie de consommer, de produire, de croître… De l’autre, un besoin urgent qu’il n’est plus possible d’ignorer. Celui de préserver l’environnement en réduisant considérablement l’exploitation des ressources naturelles et la production de déchets.
Pour répondre à cette double contrainte, adapter ses produits, ses méthodes de production et de distribution à un modèle économique circulaire semble désormais indispensable.
Le modèle linéaire actuel consiste à extraire, produire, consommer et jeter. Ce fonctionnement engendre ainsi deux problèmes majeurs, contraires à la protection de l’environnement :
- l’extraction ou l’exploitation des ressources naturelles en quantité limitée (pétrole, gaz naturel, uranium…). Cette surexploitation est en partie responsable de la déforestation ;
- la pollution de l’environnement par les déchets, qu’ils soient détruits, enfouis ou dispersés dans la nature. Ils produisent des gaz à effet de serre, polluent les sols, les cours d’eau et les océans. Ils menacent ainsi l’équilibre des écosystèmes et la biodiversité.
La transition vers un modèle circulaire est alors basée sur deux piliers :
- l’éco-conception : utiliser des matières premières durables, augmenter la durée de vie des produits et/ou les rendre réutilisables/réparables en fin d’usage ;
- la valorisation des déchets : recycler et transformer les déchets en ressources pour éviter d’en puiser de nouvelles.
“Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme”. Antoine Lavoisier
Enjeu économique
Pour les clients, les avantages économiques de l’économie circulaire sont nombreux. Que ce soit pour s’habiller, acheter un téléphone ou un appareil électroménager, les consommateurs ont trouvé dans l’occasion un bon moyen de faire des économies.
Plus indirectement, il est également possible de gagner de l’argent en achetant des produits éco-conçus. Même s’ils peuvent être plus chers à l’achat, leur meilleure durée de vie et la possibilité de les réparer les rendent plus rentables à long terme.
En revanche, ce gain économique est plus difficile à intégrer du point de vue des entreprises. Pourtant, ce modèle est vecteur d’une multitude de nouveaux marchés. Il peut permettre de gagner en rentabilité et en stabilité à long terme. En voici une illustration à travers plusieurs cas de figure :
- Le produit est toujours fonctionnel mais le consommateur n’en veut plus.
Ce dernier peut alors revendre son produit facilement et n’en fait pas un déchet. Longtemps réservé aux particuliers avec des sites comme Leboncoin, le marché de l’occasion est en pleine expansion. Notamment à travers deux stratégies principales :
- la mise en relation entre les particuliers (Vinted) ;
- le rachat aux particuliers, le reconditionnement et la remise en vente (Backmarket).
- Le produit n’est plus en état d’usage mais il est réparable/nettoyable.
Le consommateur peut le renvoyer ou le déposer auprès d’une structure qui a pour rôle de le remettre en état. Il est alors remis au même consommateur ou réintégré sur le marché. Dans le cas de produit volumineux de type électroménager, la réparation peut être effectuée directement chez le client (découvrez l’exemple de Murfy dans la deuxième partie de cet article).
- Le produit est en fin de vie.
La valorisation des déchets pouvant être une source de matières premières, le recyclage constitue également un enjeu pour les entreprises. Principe de l’éco-conception, l’enjeu consiste alors à développer des produits recyclables, fabriqués à partir de produits recyclés.
La Supply Chain de demain
Poussées par la transformation du marché et une réglementation qui tend à réduire les impacts sur l’environnement, les entreprises ont tout à gagner à s’adapter. Le modèle circulaire demande alors une organisation logistique idoine, aux impacts multiples et parfois complexes mais structurants pour construire une supply chain durable.
Adapter sa logistique à l’économie circulaire
Face à de tels enjeux économiques et environnementaux, comment adapter sa logistique à l’économie circulaire ? Comment intégrer les nouveaux flux permettant la récupération, le traitement, la refabrication, la remise à neuf, la réutilisation, la réparation, le ré-emballage ainsi que le recyclage des produits et/ou emballages ?
La transition vers une économie circulaire débouche sur la naissance de nouveaux concepts. Ils sont synonymes d’opportunités à saisir en matière d’innovations environnementales. Bien que certains existent depuis plusieurs années, voire dizaines d’années, l’enjeu consiste désormais à les déployer massivement au sein des chaînes logistiques. En voici les principaux.
L’éco-conception
Ce concept repose sur le principe global du cycle de vie du produit et regroupe l’ensemble des étapes relatives à la conception, à l’utilisation et à l’élimination du produit. L’éco-conception vise ainsi à minimiser l’empreinte écologique de ce dernier en agissant sur sa constitution, son emballage et sa durée de vie. Pour cela, l’enjeu consiste à faire évoluer les processus de production, de stockage ou de distribution des produits. Cela grâce à l’utilisation de matériaux, d’équipements et de procédés moins polluants.
La logistique inverse
L’obligation de recycler les déchets d’équipements électriques et électroniques (DEEE), en vigueur depuis 2003, a permis aux entreprises d’être responsabilisées sur la gestion de leurs produits en fin de vie.
Intégrer la logistique inverse dans sa Supply Chain consiste à ajouter de nouveaux flux physiques, d’informations et financiers.
Ces flux impliquent la collaboration avec des acteurs historiques ou émergents (récupérateurs/collecteurs et recycleurs) et la mise en place de canaux de retour tels que la collecte, le tri, le contrôle et le traitement.
Le transport durable
Pointé du doigt comme étant une source de pollution très importante, le transport peut réduire son empreinte écologique en intégrant un modèle logistique circulaire. Que ce soit par la massification et la mutualisation des flux entre les acteurs territoriaux, l’optimisation des plannings de livraison ou l’utilisation de moyens de transports adaptés.
De plus, le transport a un rôle important à jouer dans le déploiement de la logistique inverse. L’enjeu étant d’utiliser au maximum la capacité des transports lors de leurs retours à vide (blackhauling).
Prendre en compte les coûts spécifiques de l’économie circulaire
Source de nouveaux flux, les opérations logistiques liées à un fonctionnement circulaire engendrent des coûts supplémentaires qui ont un impact sur la rentabilité. En effet, un flux comme celui de la logistique inverse peut nécessiter de nombreuses opérations :
- réception des produits/emballages/déchets ;
- tri et contrôle qualité ;
- reconditionnement/réparation ;
- remise en stock.
Il est toutefois possible de limiter ces coûts en optimisant les process, les moyens et les ressources mis en œuvre dans la gestion de ces flux. Même si ces opérations supplémentaires sont coûteuses, l’économie circulaire permet également de générer de la valeur (réduction des coûts d’approvisionnement, fidélisation clients, stabilité à plus long terme…).
De plus, la logique de l’économie circulaire tend à remplacer progressivement la possession par l’usage. Le système de location ou de leasing attire de plus en plus les consommateurs et est un excellent moyen pour les entreprises d’adapter et d’optimiser les coûts logistiques.
Cela permet de construire une nouvelle stratégie logistique, qui se démarque nettement de la Supply Chain traditionnelle consistant à s’approvisionner, produire, stocker et distribuer.
Ainsi, il ne s’agit plus de générer de la valeur uniquement par la vente d’un produit mais d’offrir un service. L’objectif devient alors que le même produit soit utilisé/loué par plusieurs clients. Ce modèle fait évoluer la stratégie où il n’est plus question de produire et de vendre au maximum de produits, mais de s’assurer que ces derniers circulent le plus longtemps possible.
Très pertinent sur le plan environnemental et source d’opportunités économiques, ce fonctionnement engendre toutefois des conséquences logistiques :
- des coûts de transport aller/retour, contre un unique coût aller avec un modèle classique ;
- des coûts d’activité logistique : mise en place de process (réception, contrôle, nettoyage, remise en état…) spécifiques ;
- des coûts de gestion des produits en fin de vie, abîmés et non réutilisables.
- Le coût d’acquisition du produit peut quant à lui être amorti sur plusieurs clients. Il est également possible d’acquérir, récupérer et remettre en état des produits de seconde main. Cela permet d’avoir un impact écologique positif, tout en diminuant les coûts d’acquisition. Leur calcul devient alors un axe stratégique pour la rentabilité et la pérennité de l’entreprise.
L’économie circulaire fait ainsi évoluer les modèles de coûts car il devient nécessaire d’y intégrer ces coûts logistiques spécifiques.
Exemples concrets d’entreprises d’avenir
4 entreprises, issues de marchés totalement différents, ont réussi à construire leur stratégie sur différents piliers de l’économie circulaire. En pleine expansion, elles ont aujourd’hui une longueur d’avance. Découvrez-les grâce aux présentations suivantes.
Le recyclage
Le premier exemple est celui d’une entreprise bien connue qui vend des capsules de café jetables, Nespresso. Produit consommé en très grande quantité à travers le monde et non réutilisable, la capsule de café est une source potentielle de déchets colossale. Nespresso a alors mis en place un système de collecte auprès des consommateurs des capsules utilisées (programme take-back). Ces derniers disposent alors de sacs de recyclage à déposer lorsqu’ils se rendent acheter de nouvelles capsules. Les capsules sont alors coulées en métal et le café est redistribué en qualité d’engrais de jardin.
La réutilisation des produits
La startup Kokpit s’est, quant à elle, attaquée aux problèmes de déchets générés par les couches pour enfants. Leur stratégie ? Ne pas faire de la couche un produit à usage unique, tant la consommation pour un enfant est importante. Les fondateurs ont ainsi développé un modèle de couches lavables et réutilisables. Ils assurent également un accompagnement complet en échangeant les couches lorsqu’elles ne sont plus à la taille de l’enfant. Leur système de lavage et de désinfection élaboré leur permet ensuite de fournir les couches à de nouveaux parents, et ainsi de suite…
Découvrez l’interview des fondateurs pour en apprendre davantage.
La réutilisation des emballages
Bien que la tendance soit à l’utilisation d’emballages recyclables pour la consommation alimentaire, ils n’en restent pas moins des déchets à traiter. Cela engendre de la pollution et ceux qui passent entre les mailles du recyclage finissent trop souvent dans la nature. L’entreprise bordelaise BoxEaty a ainsi développé un système d’emballages consignés pour la consommation alimentaire. Leur but est clair, il ne doit pas y avoir de déchets. Mise en place chez les restaurateurs qui proposent des plats à emporter, la solution consiste à rapporter son emballage vide pour en bénéficier d’un nouveau. Cet emballage en verre, est ainsi récupéré chez les restaurateurs par des coursiers à vélo afin de procéder à leur nettoyage et à leur redistribution.
La réparation et le reconditionnement
Le dernier exemple concerne la fin de vie des produits électroménagers. Ces derniers sont trop souvent jetés en raison d’une panne alors que le simple changement d’une pièce peut doubler la durée de vie de produit. Ce problème génère des déchets à recycler de taille conséquente et une surconsommation de produits qui nécessitent l’utilisation de ressources en quantité limitée pour leur production. L’entreprise Murfy propose ainsi un service de réparation, quels que soient l’appareil et la panne. Pour faciliter la prise en charge, le dépannage s’effectue à domicile. Un diagnostic est réalisé en amont grâce aux éléments fournis par le client pour éviter les déplacements inutiles. Murfy récupère également des produits destinés à la destruction, les remet en état et les revend sur le marché comme reconditionnés. Ils réduisent ainsi la quantité de déchets de l’ensemble du marché de l’électroménager et permettent aux consommateurs de redonner vie aux produits au lieu d’acheter neuf.
Identifiée comme l’une des réponses au changement climatique, l’économie circulaire offre de nombreuses opportunités d’innovation. Les entreprises présentées ci-dessus en sont la preuve.
Et vous, comment pourriez-vous intégrer le modèle d’économie circulaire au sein de votre activité ?
merci pour tous ces détails sur la supply chain et les enjeux pour la plupart des économies circulaire.